HighwaytoHell

HighwaytoHell

Vendredi 1er mars 2013 à 23:13

 « Bonjour. »

L’ombre n’avait pas de forme réelle. Comme un nuage, on y voyait ce qu’on veut. Et j’avais bien envie d’y voir le pire. M’enfin, après l’accident de voiture, je présume que ça peut pas être bien plus triste ?

« Je vous les ait amenés.
-Ils savent quoi ?
-Absolument rien.
-Bien. Laisse-nous, Ambre. »

Ambre ? Noté. La jolie demoiselle se retourna vers moi, me décrocha un sourire qui m’aurait probablement retourné le bide, si les circonstances n’avaient pas été celles-ci. Non pas qu’une entité probablement multi planaire faisant une taille démesurée se trouvait en face de moi, mais…

On serait dans un jeu vidéo, y’aurait soit une cinématique, soit une musique qui annonçait un combat perdu d’avance. Malheureusement, rien ne me permettait de statuer sur ce qui m’attendait.

« Tu as peur ? »

Non. Bien sûr que non, attend. Tu m’affectes autant qu’une brise d’été un soir d’aout !

« Je dois vraiment répondre ? »

J’arrivais encore à répondre un minimum. Bien. Pas le moment de se pisser dessus de terreur.

« Qui t’as dit que la question s’adressait à toi ? »

Seconde d’incompréhension. Je me suis tourné vers Elena. Elle était toujours rayonnante. Ce qui n’était pas vraiment l’impression qu’elle était supposée dégager.

« Je n’ai pas peur. Pourquoi aurais-je peur, monsieur… ? »

Et elle était même capable de penser. Impressionnant, mon cerveau, lui, pédale dans la semoule, et mes déductions sont de l’ordre de l’évident. Quand je déduis. Je me sentais totalement spectateur de la scène qui semblait vouloir se passer avec ou sans mon consentement. Cinématique, donc.

L’entité éclata… De rire ? Quoi qu’il en fût, le fort résonna. Simulation de séisme en direct, c’est trop, merci.

« En voilà une qui a tout compris. Tu es long à la détente, toi, par contre. »

L’ombre se massa sur elle-même. Un tourbillon de ténèbres. Classe. Effet pyrotechniques dans ta face. Le tourbillon rétrécit jusqu’à faire une taille d’un petit mètre quatre-vingt, avant, évidemment, de prendre forme humaine.

« Tout n’est qu’illusions. »

Hell. Yeah. Pourquoi j’avais l’impression persistante qu’on se moquait de moi, en coulisse ? Il manquait plus que l’orgue à la Dracula, histoire que je sois sur.

« Bon, si on parlait de trucs intéressants ? Genre… Pourquoi on est là ?
-Il doit forcément y avoir une raison ?
-En admettant que notre venue dans ce… Monde, n’en ait pas, on nous a pas guidé ici pour rien. »

Je retrouve un semblant de logique, et même, d’assurance. Plus qu’un bon café, et j’peux retourner en cours. C’est le moment de me réveiller, là. Non ? Toujours pas ?

« Tant de certitudes. C’est presque troublant venant d’un être aussi fragile que toi. C’est par fierté que tu te sens obligé de montrer que tu ne te pisses pas dessus ? »

Possible. Doesn’t matter, anyway.

« Cette esquive de la question. C’est pour se la jouer mystère, ou y’a une raison précise à la dissimulation de notre raison ici ? Parce que je commence un peu à craquer psychologiquement, là. »

Pas que psychologiquement d’ailleurs. Les nerfs à vifs j’étais obligé de reconnaitre que le manque d’heures de sommeil me faisait assez souffrir. Et le passage dans ce monde semblait avoir démultiplié cette fatigue chronique. Pas comme Elena, d’ailleurs.

« Pourquoi vous êtes ici ? Mais pour détruire ce monde, bien sur. »

Donnez-moi un somnifère, pitié. 

Lundi 20 août 2012 à 17:15

 « Vous avez fait le bon choix, en acceptant de me suivre. »

 

Oui, comme le côté obscur, vous allez offrir puissance et domination du monde. On est paumé, moi et Elena. D’ailleurs elle a l’air de s’en foutre royalement. Et j’ai envie de me laisser tomber au sol et plus bouger. On nous explique quand ? Au moins celle-là ne semblait pas lire dans mes pensées. Je me sens en danger. Je me sens fatigué. Et j’me sens aussi un tout petit peu manipulé. Mais juste un peu.

« Vous allez bientôt tout comprendre. 
-Tu lis dans mes pensées aussi ou … ?
-C’est peu courant, même ici, ceux qui en sont capables… Vous n’auriez pas rencontré un humanoïde, totalement formé de ténèbres ? Il y en a un, qui sort du lot et s’approche parfois. Ils sont dangereux.
-Génial. Je le trouvais sympa, jusque y’a deux secondes.
-Si ça peut vous rassurer… Lui aussi vous aimez bien. Sinon vous seriez déjà morts, toi et Elena.
-Mmh. Je ne me souviens pas qu’on t’ait dis son nom. »

Elle éclata de rire, au lieu de se montrer perturbée.

« Evidemment que je connais vos noms. Je ne suis pas venue sauver des inconnus. »

Ha ? Parce qu’elle nous a sauvé ? De quoi ? On sauve de quoi, un mort ? L’enfer ? C’est quoi ce délire ? Et comment ça, on n’est pas des inconnus ?

Et c’est à ce moment de réflexion intense qu’Elena se retourna en souriant.

« Arrête de penser. C’est un ordre. Tu fais fondre ton cerveau pour rien. On comprendra bientôt, je le sens.
-Tu es sure qu’il y a quelque chose à comprendre ?
-Non, et c’est d’autant plus drôle.
-Drôle ?
-Avoue que l’idée de pouvoir réfléchir sur un truc auquel tu trouveras de toute manière aucune réponse te tente .»

Dis comme ça… Mais dans le fond, c’est vrai. La vie, l’Amour, La Mort… Et toutes les questions à la con que n’importe quel ado’ finit par se poser, me servait juste de matière à faire fonctionner ce qui reste de mon cerveau consumé par les jeux, les écrans, et les bouquins. Je ne dois pas penser à ça. Pas maintenant.

« Peut être… Peut-être bien. »

Silence. Elle sent mon trouble et se retourne à nouveau. On avance. La forêt, toujours la même. Pas de changement. La musique, toujours la même. Piano. Sombre. Fatiguant. J’ai l’impression de pouvoir tomber dans le coma a tout moment. Même mes nuits blanches ne m’épuisent pas autant… Ne rien dire, avancer. Se concentrer sur ses pas. Ne pas se laisser bercer par la cadence de la marche. S’appuyer au contraire sur son rythme pour garder les yeux ouverts.

« On va arriver. »

Aucune différence avec le reste de la forêt, pourtant. Mêmes arbres, même espace entre eux, même air, même tout. Et c’était d’autant plus chiant d’ailleurs. Quitte à mourir, j’aurai préféré qu’il y ait plus d’actions. Et du rock. Manque plus qu’un ange joue de la harpe et je jure que je pionce.

Et soudain.

Soudain, la vie.

Devant moi, une ville. En plein milieu des bois. Annoncée ni par le bruit, ni par un panneau ou que ce soit. Elle faisait partie intégrante d’ici, et elle donnait un peu l’impression d’être apparue par magie.  Pleins de gens s’affairant un peu partout, comme un jour de marché traditionnel. Marché moyenâgeux, cela dit. J’ai voyagé dans l’espace-temps, en fait.

« Bienvenue à Tenval ! »

La ville me semble normale. Médiévale, mais tout à fait normale, sinon. Tout l’est. Et ça, franchement, ça ne me plait pas du tout. La jeune femme qui nous précédait nous incita à la suivre. Elena me fit signe d’obtempérer. J’obéis, encore. Mauvais pressentiment. Tout semblait rangé en quartier bien définit. On se faufila dans la masse sans problèmes. Maisons de pierres. La musique s’était arrêtée. Seule la vie de château standard, répondant à la grande majorité des clichés cinématographiques de nos jours était présente.

On arriva au centre de Tenval. Devant un énorme bâtiment tout aussi en pierre grise que le reste. Haut, et rond, il ne disposait que d’une entrée, conçue pour laisser entrer des truc gigantesques. Des armes de siège, peut-être. Ou bien c’était que de l’intimidation.

Un flashback me revint alors.

« Tout ici n’est qu’une illusion »

Et devant nous, la normalité de ce monde absurde s’effaça.
Et une ombre gigantesque apparut.

« Merde. On est dans la merde. »

Mardi 7 août 2012 à 23:00

 Chapitre moins intéressant, mais de... Transition, dirons nous. Court aussi.


Elena. On nageait en plein délire. Manquait encore l’éléphant rose.

-T’étais pas censée être en pyjama ? Et elles sont où, mes bières ?
-DMC !
-Elena, quelle vulgarité !
-Bah quoi ? Dans ma chambre.

Elle éclata de rire. Cette blague venait de moi, à la base. J’ai une mauvaise influence sur les gens.

-Même mort tu restes un grand blasé dis-moi.
-Attend, comment tu sais, que je suis mort.
-Bah quoi, ce n’est pas le paradis ça ?
-Mais… Mais qu’est-ce que tu foutrais là ?
-Je suis un ange ?

Elle éclata de rire, encore. Cette fille était imperturbable. Mon regard soutenu et désapprobateur m’apporta un élément de réponse.

-Je suis morte, je crois. Pour ça que je t’ai appelé. J’étais gravement malade. Je vomissais du sang, en fait.
-Donc, au lieu d’appeler une ambulance, tu as préféré me joindre ?
-Attend, l’ambiance à la maison aurait été mortelle avec toi.
-Tu m’as pas attendu.
-Devant ton retard j’ai improvisé. Et toi, tu fous quoi, ici ?
-Saloperie de bagnole.
-Dis plutôt que t’as encore marché en plein milieu de la route avec ta musique à fond avec comme prétexte « A cette heure-ci, y’a personne ».
-Presque. Je n’étais pas au milieu de la route. La voiture a glissé, à cause de la flotte. Je crois que le mec était bourré, sinon il m’aurait facilement évité.
-Possible. Tu le sauras jamais. Mais je pensais que morte, je pourrais voler et tout. Mais non. C’est nul.

On était peut être décédé, et elle, elle pensait qu’à faire joujou. Elle se comportait vraiment comme une petite fille des fois. Pour maintenant, c’est plus vraiment important, je suppose. L’air de la clairière était pur, et je me sentais tellement fatigué…

-Il faut pas dormir.

Voix féminine. Pas Elena.

-Et vous êtes ?

J’avais même pas pris la peine de me tourner, tiens. La fatigue me retire une bonne partie de ma politesse habituelle, j’ai bien l’impression.

-Ca n’a pas d’importance, je crois. Vous êtes… Uniques, pour être arrivés ici. Venez. Je vais vous montrer un endroit sûr.
-Parce qu’ici, c’est pas un endroit sûr ? On est pas morts, en fait ?
-Tout ici n’est qu’illusion. Ne vous y fiez pas.

Instant de réflexion de ma part.

-Qu’est ce qui me dit que vous êtes de notre côté, alors ?
-Si vous en doutez, c’est que vous commencez à comprendre comment cet endroit fonctionne.

Rire cristallin. Je me tournais enfin vers la damoiselle. M’attendais encore à une étrangeté physique, dans tous les sens du terme.

J’eus droit à une belle surprise.

Une surprise brune. Relativement grande. Elle était fine. Svelte. Sa chevelure longue descendait jusqu’au milieu de son dos. Elle portait des fringues… Médiévaux. Pantalon en toile, et vêtement en fourrure. C’est qu’elle devait crever de chaud, là-dedans. Par contre, moi et Elena étions habillés dans nos fringues de tous les jours… En parfait état.

Les miennes devraient être dégueulasses. Et trempées, aussi, d’ailleurs.

Retour sur la demoiselle. Ses yeux étaient d’un vert émeraude magnifique. Visage très fin. Non dénué de charme. Sur sa bouche, un sourire discret, mais charmant. On devinait un corps souple et gracieux à travers ses vêtements. Trop belle pour exister, en somme.

-C’est pas bien de dévisager les gens comme ça.

En effet. Je détournais un peu le regard et elle éclata à nouveau d’un rire cristallin et pur. Très agréable. Mais c’était trop parfait. Tout ici n’était qu’illusion elle avait dit. Elena me sourit. Un sourire communicatif. Et surtout une invitation à suivre la demoiselle qui prenait les devants vers la forêt.

Je la laissais passer en lui soufflant un « Les dames d’abord » à l’oreille, et pris l’initiative de fermer la marche.

On le savait pas encore, mais on venait de jouer notre vie sur cette simple décision.

Lundi 30 juillet 2012 à 21:15

 Lumière.  Flash lumineux. Les yeux qui brulent. Douleur foudroyante dans le ventre. Envie de hurler. Ma bouche reste close.  Liquide lacrymal qui s’écoule sur mes joues. Je suis allongé. Mon dos fait échos à mon abdomen. Des ondes de douleurs le parcourent. Je souffre le martyr. J’arrive enfin à prendre une première inspiration. L’air rentre par ma bouche, et arrive dans mes poumons, brûlant tout sur son passage. J’hurle à la mort. Cerveau qui refuse de fonctionner. Je ne suis qu’un tas de chair endoloris. Mes deux bras sont inertes. Mes jambes se débattent furieusement, par réflexe devant la douleur.

Des voix. J’entends des voix. Dans ma tête. Et en dehors. Tout raisonne.

Et soudain…

Le silence.
La paix.

Mon corps cesse sa pseudo crise épileptique. Mon cerveau recommence à fonctionner. Et enfin, j’ouvre les yeux. Hell yeah. C’est officiel, je suis mort. Mais je ne pensais pas aller au paradis après. Je suis en plein milieu d’une clairière ouverte et lumineuse. Des arbres entourent l’endroit, comme pour le cacher aux yeux du monde. J’entends le bruit de l’eau qui coule. Doit y avoir une cascade pas loin. Je lève les yeux vers le ciel. Magnifique. Bleu profond, avec un soleil éclatant.

J’ai était téléporté dans un pays où c’est l’été. Cool. Faudra que je songe à me prendre des voitures dans les côtes plus souvent. Trêve de sarcasme. Je ne comprends pas grand-chose là.  Puis y’a deux secondes, j’entendais des voix. Donc, je suis fou ? Mort ? Ou bien, je suis dans le coma, et mon corps est plongé dans une transe hallucinatoire, pendant qu’on s’occupe sur moi, sur Terre ?

-A la fois rien, et tout ça à la fois.

J’ai même le droit à l’hallucination du divin prophète évidemment invisible qui va me guider dans ce monde de fou que je vais devoir sauver d’un grand malheur, on parie ?

-Quel petit esprit étriqué tu as. Tu débordes de sarcasme. Je suis derrière toi. Se servir de ses sens, c’est parfois mieux que réfléchir. Surtout vu tes capacités visiblement limités.

Volte face. Créature de petite taille. Genre très petite taille. Sans formes réelles. Une tache d’ombre, qui semblait consistante, et pourtant. Ce qui la constituait était en mouvement perpétuel à l’intérieur d’elle-même. Merveilleux.

-Ca surprend hein ?
-Pas autant que t’entendre parler dans ma tête et lire dans mes pensées, cela dit.
-Pourquoi tu te fatigue à parler alors ?

Pas faux. Reflexes. Bon il va m’expliquer, le truc, là ?

-Je suis pas un truc.
-Tu es quoi, alors ? Et je suis où, au juste, là ?
-Tu ne devines pas ? Tu vois bien que t’es pas mort.
Donc j’ai été téléporté après un accident de voiture dans un endroit où les lois de la physique que je connais n’existent pas comme elles sont censées être. Tellement plus logique de croire ça que mon décès. Evidemment.

-Hé ! J’ai dis que tu étais en vie ?

Bon d’accord, là, il me gave. Je comprends rien, et il se fout de ma gueule.

-C’est toi qui est nul, pas moi qui me fout de toi.

Et il disparut. Comme ça. En laissant, une trace sur le sol. Une trace qui ressemblait fort à un S. Il a signé ? Ce truc à signer ? Respirations. Inspirer, expirer. Ne pas paniquer. On avance, et on réfléchira après, mec. On avance, c’est tout. Ne pas penser. Surtout. Se dire qu’on est en vie, quelque part. Se dire qu’on a pas perdu famille, amis, repère en une fraction de seconde.

Une musique s’éleva, alors que mes pas me conduisaient là où ils pouvaient après avoir choisi une destination aléatoire. Sauf qu’il n’y a rien d’autres que des arbres. Des arbres trop loin pour cacher des mélomanes. Même avec des enceintes, je n’entendrais pas aussi nettement. Le son semblait provenir de nulle part et de partout à la fois. Je continuais à avancer. Piano. Mélancolique et puissant. Crescendo.

Le volume continuait de monter. Mon corps entra en résonnance avec. Chaque particule de mon corps semblait vibrer au rythme de la mélodie. Mon cerveau se vidait. La fatigue, monta brusquement.

Soudain.

Silence.

Et Elle apparut.

-Salut !

Sourire enjôleur. Elle était nimbée de lumière.

-Salut, Elena.

Hell, yeah.

Samedi 21 juillet 2012 à 4:29

 Le ciel est rougeoyant. L’air balaie un spectacle de désolation. L’odeur de mort envahi mes naseaux. Le feu partout. Battement d’aile puissant. Se pose au milieu du Chaos. Au milieu de cadavres, dans des états déplorables. Eventrés, en plus moins de morceaux. Brulés. Ou juste broyés. Pittoresques. Maisons détruites, comme soufflées par des tornades. Je sens la rage gagner. Le feu bout au fond de mon ventre.

 

Hurlement monstrueux, hurlement ardent.

Réveil. Hurlement qui fait échos à celui de la nuit. Mon portable. Putain. J’aime être levé délicatement. Genre par du Bullet of my valentine à fond. Sauf que ça c’est la sonnerie des appels. Et on appelle plus les gens, à quatre heure du mat’.

-Ouais allô ?
-Je te réveille ?
-A ton avis, Elena ?
-Je dirais oui. A la voix. Mais avec toi, on sait jamais. En plus tu réponds toujours.
-Tu verrais ma sonnerie…
-Je me doute de ce que c’est .
-Dis moi que tu m’appelles pour une bonne raison.

J’appuyais à l’oral sur le « bonne ». Pas la première fois qu’elle avait la lubie de l’appel nocturne. Pas dérangeant d’habitude, mais là je dormais. Mieux, je rêvais. Pas le meilleur, mais ça se prend. On n’a pas tous la chance de rêver souvent.

-Euh…
-Trouve. Vite.

Excédé, je me laissais retomber sur mon oreiller, portable toujours à la main.

-Non, mais en plus y’avait vraiment une raison !
-Tu vas pas me faire le coup du poisson rouge, quand même ? Pas à cette heure-ci ?

Elle en avait rien à faire de l’heure. Et avait tendance à oublier que je dormais, des fois. Rarement, mais n’empêche que.

-Ha oui. Ramène-toi.
-Maintenant ?
-Bien sur !

Quand j’vous disais, qu’elle s’en foutait, de l’heure…

-Donnes moi une bonne raison de bouger mon pieu à quatre heure du mat’, pour venir.
-Y’aura de la bière ?
-Mais encore ?
-Tu me verras en pyjama ?
-Je m’en fous. Dis-moi pourquoi tu veux que je vienne. Sinon je raccroche et je pionce.
-Tu dormiras pas .

Elle n’avait pas tort.

-Tu fais chier.
-Je sais. En plus je te nourris et te désaltère. Tu ne peux pas refuser.
-Tu me nourris ?
-Pizza. Aller, viens, j’ai besoin de toi.

Elle raccrocha. Dites-moi que c’est une blague. Ou une prolongation foireuse de mon rêve. Genre mise en abîme. Et là, j’étais sensé me réveiller. J’attendis, quelques secondes. Fait chier.

Se lever, la tête encore embrumé par le sommeil. Parce que, oui, j’obtempérais. J’allais vraiment y aller. Marcher quinze minutes dans le froid, sans même savoir pourquoi. Pendant que je pestais à voix haute contre Elena, pour son manque d’informations et d’égards à mon sommeil, contre moi, pour être assez con pour me bouger à cette heure, et contre l’univers entier, parce qu’il le valait bien, je pris mes affaires, et me préparais à sortir.

Je pouvais me permettre tout le bordel que je voulais, y’avait personne à la maison. Pour les trois jours à venir j’étais seul. J’aurais pu en profiter pour me sociabiliser un peu, mais non. Et l’autre qui en profitait… Blouson en cuir sur le dos j’sortais en claquant bien la porte de devant d’exaspération.

Musique dans les oreilles, et j’étais parti. Il pleuvait. Fort. J’voyais rien. Et j’avais froid. Génial. La raison avait intérêt à être excellente. Sinon quoi ? Pas comme si j’allais m’énerver sur elle. Désarmante, cette fille.

Marche, sur les pavés. Musique à fond. Sous la pluie. Ca serait pas désagréable, si je n’avais pas perdu potentiellement six heures de sommeils pour. J’étais plongé dans mes pensées. Dans ma musique. Tellement plongé dedans que j’ai pas vu la voiture qui arrivait dans le virage. Que j’ai pas vu, quand elle a fait des appels de phares en tentant de freiner. Par contre, j’ai bien senti le véhicule me percuter, emporté par ses pneus glissant sur les pavés trempés.

La seule question que je me pose, maintenant, c’est…

Bordel, je suis où ?

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